C’était un petit garçon formidable

Nancy. L’ambiance est lourde dans la salle d’audience. Sur le banc des parties civiles, les parents du petit Antoine, 4 ans, décédé tragiquement à l’automne dernier, essuient leurs larmes. Face aux magistrats nancéiens, la quadragénaire poursuivie pour homicide involontaire, elle aussi, a les yeux mouillés. Le 13 octobre, alors qu’elle garait son van sur le parking du lavoir à Pagny-sur-Moselle, elle a écrasé l’enfant. « C’est une affaire dramatique. La question est de savoir si vous avez commis une imprudence, si vous avez eu un comportement adapté », tente de faire comprendre doucement le président Christian Haouy. La conductrice s’accroche à la barre et tente de répondre aux interrogations des uns et des autres. Il est 14 h quand elle s’engage dans le parking, elle aperçoit un groupe d’adultes et d’enfants dont deux à vélo, une troisième sur une trottinette. « Je me suis arrêtée pour les laisser passer », assure-t-elle. Ensuite elle a entrepris une manœuvre en marche arrière pour ranger sa camionnette dans laquelle avaient pris place ses propres enfants. « Comme les sièges du véhicule sont hauts et n’offrent pas de visibilité, je me suis aidée des rétroviseurs », reprend-elle. Avant d’avouer que ceux-ci ne lui offraient qu’une vue partielle sur l’arrière gauche. Elle a bien vu les signes de la main d’une femme lui intimant l’ordre de stopper, mais trop tard. Le petit Antoine était déjà passé sous les roues du van. Sous les yeux de son papa. Formée aux premiers secours, elle a tenté de ranimer l’enfant en pratiquant un massage cardiaque. En vain. 4 mois de prison avec sursis requis « Je me suis refait le scénario tellement de fois que je ne peux plus être précise », chuchote-elle à Me Niango, avocat des parties civiles qui la presse de donner une nouvelle fois la chronologie de ses souvenirs tout en l’accablant. « Vous êtes dans le déni de votre propre responsabilité. Vous rouliez dans un véhicule dangereux, une arme aveugle ! ». « Votre manœuvre exigeait non pas une impression mais la certitude que vous ne faisiez courir aucun danger aux enfants », poursuit le procureur. Pour Jean-Paul Hartmann, la conductrice s’est montrée imprudente et a commis une faute d’inattention. Il requiert 4 mois de prison avec sursis, une amende de 1.500 à 2.000€ et une suspension de son permis de conduire pour une durée de deux années. Invitée à s’asseoir, la quadragénaire décline l’offre comme s’il lui fallait boire sa pénitence jusqu’à la lie. Me Sammari, à la défense, tente de voler à son secours. L’accident était imprévisible, l’enfant a surgi soudainement et sa cliente n’a commis aucune faute. « Elle s’est garée en marche arrière sur une place en bataille, comme on l’apprend lors de l’examen du permis de conduire », plaide-t-elle. Le tribunal veut prendre le temps de la réflexion et met l’affaire en délibéré au 29 juillet. Au moment de sortir, la conductrice joint ses mains en prière demande pardon plusieurs fois à celle qui a perdu son enfant. « C’était un petit garçon formidable », souffle celle-ci, d’une retenue folle pendant toute l’audience. Valérie RICHARD

Social Bookmarks: